DEMOCRATIE ET DICTATURE DE L'OPINION
Il existe, bien entendu, des régimes plus ou
moins démocratiques : des échelles de vertu démocratique sont dressées par
les institutions spécialisées qui ressemblent à des agences de notation.
A la base de la démocratie,
il y a naturellement le pouvoir du peuple. Ce peuple qui a rappelé ses
exigences à l’égard des gouvernants un peu partout dans le monde en cette année
2011 au point d’avoir été désigné par le magazine Time comme ‘’ l’homme de l’année’’.
Et, pourtant, la voix
du peuple n’est pas toujours jugée légitime.
QUAND
LES GOUVERNANTS CHERCHENT A ECHAPPER A LEURS RESPONSAVBILITES
Rappelons-nous ce qui s’est
passé lorsque le dirigeant grec Papandreou a voulu soumettre à son peuple par
voie de referendum le plan de rigueur qui lui était imposé par les autres pays européens.
Il a été sermonné, menacé par ses
collègues au point qu’il a du renoncer à cette consultation et faire approuver
le projet par le Parlement. Ce qui voudrait dire que, dans certaines
circonstances, la voix du peuple n’est pas toujours bienvenue.
Et, en effet, un
dirigeant charismatique peut abuser de son pouvoir pour court-circuiter les
élus et refuser leur médiation en s’adressant directement au peuple.
Il peut aussi refuser d’endosser la responsabilité de décisions impopulaires
en se couvrant de la voix populaire.
Par ailleurs, on glisse facilement du
referendum au plébiscite lorsque les gouvernants conditionnent l’opinion pour
obtenir une adhésion.
Mais on ne peut non plus
refuser dans une démocratie de faire appel au peuple si les circonstances l’exigent.
Tout est justement affaire de circonstances et d’honnêteté dans le libellé des questions.
Le recours direct au peuple en dehors
des élections doit rester exceptionnel.
Des
cascades de dissolutions, d’élections anticipées ou de referendums sont à la
démocratie ce que la fièvre est à l’être humain, un état pathologique prononcé.
DE
LA DEMOCRATIE A LA DICTATURE DE L’OPINION
L’excès en toutes
choses est blâmable. La sondagite aigue qui sévit dans nos sociétés fragilise
la démocratie.
La construction d’un
pays ne se fait pas dans l’instantané. Le sondage tend à remplacer la
gouvernance par la dictature de l’instant. Comment prendre en considération les
intérêts supérieurs d’une Nation lorsqu’il faut satisfaire les pulsions au jour
le jour ?
Les sondages sont comme
les modes. Ils sont enthousiasmants et fugaces, apparemment plébiscités et aussitôt
hors du temps.
Les sondages sont des
instantanés alors que la vie d’une Nation est un film.
Ils additionnent des torchons
et des serviettes alors que la politique et synthétique et globale.
Ils instaurent la dictature
du présent alors que la vie d’un pays se conjugue au futur.
Ils transforment les
dirigeants qui s’emmêlent dans leurs filets en des girouettes soumises à tous
les aléas d’une dérive climatique.
La démocratie ne doit
pas être confondue avec la dictature de l’opinion.
Charles Debbasch