Wednesday, October 04, 2006

JE VOTE POUR L’ADVERSAIRE DE MON AMI LE PLUS PROCHE

Lorsque des enfants se disputent un jouet, ils préfèrent parfois le casser plutôt que de le voir tomber dans les mains de leur frère ou de leur copain. Le comportement de certains adultes n’est pas très loin de cette attitude. En politique, les plus dangereux adversaires ne sont pas ceux qui se trouvent dans le camp adverse mais ceux qui se situent dans la même mouvance. C’est leur électorat qu’il va falloir conquérir. C’est avec eux que l’on va entrer en concurrence pour les places.C’est eux qu’il faut éliminer pour sauvegarder son hégémonie.

La compétition présidentielle est une bonne illustration de cette loi universelle. Valéry Giscard d’Estaing raconte dans le tome trois de ses mémoires qu’il a été battu en 1981 parce que Jacques Chirac a fait voter pour François Mitterrand. Le calcul des chiraquiens était simple. Ils craignaient que la réélection de Giscard permette au courant giscardien de laminer définitivement le mouvement gaulliste. Ils espéraient aussi qu’après avoir éliminé Giscard, les socialistes s’effondreraient vite. Ce calcul se révéla erroné mais Giscard fut bien battu.

En 1995, les socialistes mitterrandiens irrités par l’ingratitude de Jospin et par la proclamation de son devoir d’inventaire à l’égard de François Mitterrand préférèrent voter Chirac plutôt que Jospin. On vient d’apprendre qu’un ministre de l’actuel gouvernement de la tendance Villepin avait déclaré qu’il opterait pour Ségolène Royal plutôt que pour Nicolas Sarkozy. Il est trop tôt pour savoir s’il convaincra ses affidés. Mais il illustre à sa façon la loi de la politique : l’adversaire de mon ami le plus proche est moins dangereux que mon allié.

Charles DEBBASCH